A l’occasion de la sortie du film de Thomas Bidegain,
Les Cowboys, quelques questions à François Emmanuelli, décorateur (ADC).
Qu’est-ce qui a vous attiré dans ce projet ?
Tout d’abord le plaisir d’être appelé par Thomas Bidegain que j’avais rencontré sur le tournage de De battre mon cœur s’est arrêté, alors qu’il était le tout nouveau "conseiller pétillant" de Jacques Audiard (nous avions immédiatement sympathisé).
Puis, dès la lecture des premières lignes du scénario, la description de la fête country.
Et enfin nos premières discussions pendant lesquelles il m’a confié, la vanne en embuscade comme toujours, ses réflexions, ses intentions et parfois ses doutes.
Que souhaitait Bidegain pour les décors ? Existaient-ils déjà dans son scénario ?
Thomas : « Entre les lignes c’est l’histoire d’un cowboy (Alain) dont la fille (Kelly) a été kidnappé par des indiens. Il va partir a sa recherche en territoire Comanche. De tribu en tribu, tout apprenant leur langue, en emmenant parfois son fils (Kid) dans sa quête, il va s’épuiser, lâcher son boulot, se ruiner...Kid, devenu adulte, part et s’enfonce a son tour, toujours plus loin en territoire inconnu... »
Le titre, le casting, la lumière, les costumes, les repérages et la conception des décors ont suivi cette idée. On peut dire que c’était : « Tous avec moi ! C’est droit devant... »
Comment imagine-t-on des "cowboys français", leur univers, leur maison... dans la France de la fin du XXème siècle ?
Les "cowboys français" existent. Nous en avons rencontré. Certains vivent à fond leur passion au quotidien et il semble que rien n’a du vraiment changé entre les années cinquante et aujourd’hui. C’est justement leur projet.
Pour la maison familiale, ce fut effectivement un peu compliqué. Nous avions imaginé deux possibilités.
D’un coté le "cowboy français" fasciné par l’Amérique des les années 60/70 et dont l’étendard serait, pour simplifier, la Harley Davidson.
Et de l’autre, ce qui a été notre choix, le cowboy plus "roots", peut-être moins cultivé, plus rural que le premier qui vit en famille dans une sorte d’hacienda, et donc dans un décor dépouillé, sans référence directe si ce n’est un jukebox.
Quand je dis plus compliqué je veux souligner la difficulté d’être dans une ligne esthétique juste et épurée tout en ayant quelque chose à filmer.
Avez-vous tourné dans les différents pays où est située l’action ? Avez-vous rencontré des difficultés particulières ?
La partie française (5 semaines) a été tournée entre Lyon et Chambéry. Pour ce qui concerne l’Europe du nord et le Pakistan, on a tourné à Anvers (1 semaine) et en Inde (2 semaines), une équipe dans chaque pays.
La partie pakistanaise ne pouvait évidemment pas être tournée sur place. Nous avons donc construit le camp des refugiés, la police station et l’appartement d’Hamed dans la région du Rajasthan.Et tout un tas d’aménagements pour cacher le fait que nous étions en Inde.
Autant en France qu’en Belgique nous avons la même conception du décor et plus généralement du cinéma, autant les techniciens indiens sont, on s’en doute, totalement dans un autre monde.
Il a fallut que les 2 parties fassent preuve de beaucoup de bonne volonté et de patience. Ca n’a pas été facile mais souvent très agréable...
Différents pays et milieux, souvent lointains...le film vous a demandé beaucoup de documentation ? De la préparation à distance ou alors sur place ?
Non, pas de documentation particulière. Par contre il a fallu être très attentif à donner le maximum d’informations au fur et à mesure, alors que nous étions en tournage et que la partie indienne paraissait bien loin dans le plan de travail pour être une urgence. Un classique.
Un souvenir particulièrement fort sur le film ?
Evidemment pour moi qui ne voyage pas beaucoup, passer un mois dans le Rajasthan avec Olivier Seiler, mon grand pote qui m’a secondé, restera un très beau souvenir.
Sinon, en dehors d’une multitude de moments joyeux car nous étions tous habités par le projet, un soir alors que le reste de l’équipe française venait d’arriver à Udaipur ...l’annonce de l’attaque de Charlie Hebdo....
Rien à voir avec Les Cowboys : le film, le spectacle ou l’expo…qui vous a marqué récemment ?
Elianes au théâtre du Gymnase et Les Faux British au théâtre Tristan Bernard (attention théâtre loufoque)
Je suis mort mais j’ai des amis au cinéma si encore en salle
Les cowboys encore en salle !
Faillir être flingué de Céline Minard aux éditions Rivages
Les Cowboys Thomas Bidegain 2015
© Antoine Doyen