La Vénus à la fourrure vient de sortir en salle, un huis-clos entièrement situé dans un théâtre parisien. Jean Rabasse, pour cette première collaboration avec Roman Polanski, répond à nos questions.
Comment abordez-vous la lecture d’un scénario ?
Ma première lecture n’est pas celle du décorateur, j’essaye de ressentir la force et l’émotion d’un scénario, comme tout le monde. Après seulement viennent alors les questions du décorateur
Comment exprimez-vous vos idées ou intentions de décor ?
Ma première démarche est toujours d’ouvrir au maximum la discussion. J’écoute d’abord, je fais parler le réalisateur, je ne veux pas m’exprimer tout de suite, je veux absolument capter cette intention première du réalisateur, son rêve, sa volonté.
Quand c’est clair pour moi, alors je peux affirmer d’autant plus fortement ma vision et ma démarche.
De la lecture du scénario à votre dernier jour sur le film, quelle phase préférez-vous ?
Tout est intéressant et fort.
…et celle que vous redoutez le plus ?
Même si effectivement, le moment du devis est toujours très délicat, c’est le moment où la vision du décorateur rencontre la réalité du film. C’est là que, avec la production et le réalisateur, on trouve la véritable échelle du film, sa réalité, son incarnation.
Travailler pour un réalisateur, un chorégraphe, un spectacle de cirque…de réelles différences ?
La différence est dans l’écriture, pas dans le support. Doit-on écrire ensemble le spectacle comme au Cirque du Soleil ou dans les spectacles de Philippe Decouflé ? Ou bien est-on devant le texte écrit d’une pièce de théâtre ou d’un scénario ? C’est là une des grandes différences.
Sinon, il y a le rapport au réel qui est très fort au cinéma, alors que le spectacle vivant peut naviguer entre le réel et la plus pure abstraction.
En tant que spectateur, quels films vous ont marqué ?
Des Enfants du Paradis à A bout de souffle, The Ghost Writer et tous les films de James Gray.
En dehors du cinéma, des décors qui vous ont fait rêver (théâtre, expo, spectacle) ?
Un spectacle de Bob Wilson, La flûte enchantée à l’Opéra Bastille m’a laissé une impression toujours très forte.
Votre plus belle aventure ?
Je crois, sans trahir mes autres projets, que The Dreamers de Bernardo Bertolucci reste un des moments forts de ma carrière, mais ce n’est vraiment pas le seul.
Quelques mots sur La Vénus à la fourrure ?
Un projet éclair que l’on a fait en courant, dans tous les sens du termes. Six semaines entre le premier rendez-vous avec Polanski et la livraison du décor de théâtre que nous avons presque entièrement reconstruit à l’intérieur du théâtre Récamier.
Les constructeurs ont commencé en même temps que le dessinateur, c’était de la folie, j’ai tracé la scène à construire directement au sol, puis on a pris le temps de dessiner le reste.
C’était une très belle rencontre avec Roman Polanski que tout ce charivari amusait comme un enfant, et qui m’a laissé une grande liberté tout en étant très précis, un grand professionnel.
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